D’hier à aujourd’hui
La vie la chargea de fardeaux croissants, pour alléger ceux des autres. Au pire des épreuves, elle resta encourageante, tonique, stimulante, toujours et pour tous, simplement et sans grandes phrases.
Tout cela témoigne d'un amour extraordinaire, et extraordinairement efficace.Père R. Laurentin
Sa place dans l'histoire de notre communauté
Yvonne Beauvais (1901-1951), devenue en 1927, Sœur Yvonne-Aimée de Jésus, fut tour à tour maîtresse des novices, Supérieure de notre communauté puis fondatrice et première Supérieure Générale de la Fédération des monastères de notre Ordre.
Elle conjugua une ardente recherche de Dieu avec une attention humaine et apostolique efficace à tout et à tous. A peine entrée au monastère elle avait lancé le projet de construction d'une clinique médicale et chirurgicale à Malestroit. Elle en fut la cheville ouvrière.
Des grâces et des épreuves exceptionnelles donnèrent à sa vie la forme d'une ligne brisée où tout converge en ligne droite. Elle fut menée par des voies étonnantes et difficiles. Sa vie hors-normes s'explique par l'inspiration profonde qu'elle eut, tout enfant, d'aimer le Christ plus que tout le monde. Cette histoire d'amour entre Dieu et Yvonne Aimée est l'axe unique de sa vie. C'est à ce niveau de l'amour que l'aventure de Mère Yvonne-Aimée est intelligible et extraordinaire.
De sa naissance à son entrée au monastère
Yvonne Beauvais est née le 16 juillet 1901 à Cossé en Champagne, diocèse de Laval. Orpheline de père à 3 ans, Yvonne est confiée à ses grands-parents maternels, tandis que sa mère prend un poste de directrice d'école. Sa grand-mère lui apprend à mieux connaître Jésus et l'initie au mystère de l’eucharistie:
"Un jour dans une église, grand-mère me fit faire un acte d'adoration et une communion spirituelle". Cela éveille en elle, dès ses 6 ans, un désir ardent de s'unir à Jésus : "Chaque fois que je passais devant une église, je Lui disais : « Petit Jésus, sors de ton tabernacle et viens dans mon cœur. »"
Après Argentan de 1907 à 1909, Yvonne suit sa maman à Toul de 1909 à 1913. C'est pendant ce séjour, le 30 décembre 1910, qu'elle fait sa première communion. Elle dira : « Après avoir reçu Jésus-Hostie, mon bonheur fut si grand que [...] je ne savais que dire à l'hôte de mon cœur : Je t'aime avec toutes mes forces, toute mon âme. Je t'appartiens totalement. Et j'ai senti qu'Il me prenait tout entière.» Dans la petite chapelle de la Rue de la Barouillère à Paris, elle promet ce jour même de prier spécialement pour les prêtres. Le surlendemain de sa première communion, Yvonne s'engage par un « pacte », écrit de son sang et qui témoigne de la radicalité de son engagement:
« Ô mon petit Jésus, je me donne à Toi entièrement et pour toujours… Je ne vivrai que pour Toi... Je te supplie de me faire devenir sainte, une très grande sainte, une martyre... Je veux sauver beaucoup d'âmes... Je veux n'être qu'à Toi, mais je veux surtout Ta Volonté. Ta petite Yvonne. 1er janvier 1910.»
À 13 ans, elle renouvelle son offrande, en faisant un journal « pour s’aider à monter vers Jésus, et Jésus crucifié » : « Je voudrais (…) faire beaucoup de bien... Je n'ai qu'un désir : faire plaisir à mes dépens ». L'amour de Dieu qui l'envahit rayonne alors dans un service constant du prochain. Après 2 années scolaires en Angleterre, Yvonne termine ses études à Paris. Elle peut donc se consacrer au service des pauvres pour lesquels elle manifeste un amour spontané depuis son enfance. Tous les métiers lui sont bons pour se procurer l'argent nécessaire à leurs besoins (peintre d'images, concertiste, écrivain de romans et même bonne à tout faire et cuisinière extra). Pourquoi fait-elle tout cela ? Elle répond: « C'est pour toi, puisque les pauvres c'est toi, Jésus. Tu as consacré le pauvre comme tu as consacré l'hostie ».
Le 18 mars 1922, Yvonne vient en convalescence à Malestroit. C'est là que l'appel à porter la croix du Seigneur résonne dans son cœur et elle comprend qu'elle doit tout quitter - y compris le fiancé qu'elle avait choisi - pour suivre Jésus de plus près. Commence alors pour elle une vie d'abandon total à Dieu où alternent grâces et faveurs surnaturelles (extases, bilocations, stigmates etc.) et des épreuves multiples (nombreuses maladies, sévices du démon, épreuves morales liées à ses fonctions ou à des missions, spécialement envers des profanateurs de l'eucharistie).
Devant les appels les plus dérangeants, les plus exigeants, elle se sait guidée par Dieu : « Hospitalise en toi la tendresse de Dieu, rayonne-la autour de toi, elle te reviendra double en retour ». Aussi répond-telle par une parfaite obéissance dans l'amour, la reconnaissance et la joie : « Je suis une vaincue du Don divin, une vaincue de I'Amour, une vaincue de ta joie. [...J Ma joie est infinie d'être une vaincue car je sais bien que même en me donnant tout entière, je ne pourrai jamais me donner comme Il s'est donné à moi ! » (1926). Pour Yvonne, le Christ est la clé de la joie véritable, celle dont le monde a un immense besoin.
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Sa vie à Malestroit
Ce n'est que le 18 mars 1927 qu’elle peut réaliser sa vocation d'Augustine à Malestroit : elle devient alors Sœur Yvonne Aimée de Jésus. Très vite, elle doit assumer des responsabilités : cheville ouvrière de la construction d'une clinique moderne, dont elle sera la première cuisinière, puis maîtresse des novices (avec 35 novices). Mais, dans le silence du cœur, elle écoute l'appel secret du Seigneur : « Semblable à l'Épouse du Cantique, faites, ô mon Seigneur, mon Divin Époux, que ma vie se passe à vous chercher avec ardeur, à vous servir avec générosité, à vous aimer sans mesure, afin qu'en moi vous trouviez l'amie délicate et fidèle, la fiancée généreuse et abandonnée, l'épouse humble et tendre. » (1931)
À partir de 1935, son activité de Supérieure n'est que le rayonnement de sa charité. Aussi exhorte-t-elle ses sœurs : « Notre esprit doit être essentiellement un esprit d'amour - notre voie, une voie d'Amour. (...) II faut que l'on puisse dire d'une Augustine de la Miséricorde : elle est charité, parce qu'elle fait tout par amour, parce qu'elle anime tout de l'Amour. (…) L'Amour donne le prix à tout, à nos moindres actes ». (1935-151) Pour rendre plus étroite l'union entre les monastères d'Augustines de la Miséricorde, elle envisage la création d'une fédération. En attendant que Rome l'autorise, elle est élue Présidente du Conseil de l'Ordre. Un voyage en Afrique du Sud - de février à mai 1938 - lui permet de mieux saisir les besoins des missions du Natal, ce qui justifie entre autre l'instauration d'un noviciat missionnaire.
Mais la mission de Mère Yvonne Aimée ne s'arrête pas à son couvent ou à l'Ordre des Augustines, elle s'étend à la France et au monde.
Pendant la guerre, elle va étonner son entourage par son courage et son sang-froid. Elle prend de gros risques en accueillant clandestinement à la clinique, outre le général Audibert, chef de la Résistance de l'Ouest, des parachutistes de diverses nationalités et des résistants blessés qu'elle parvient à soustraire à la Gestapo. Un des bénéficiaires de son « hospitalité » dira : « Ce qui nous frappait le plus, c'était sa sereine assurance, foncièrement humaine. Elle savait organiser et tout diriger avec le sourire et une douce obstination ». La reconnaissance nationale et internationale lui vaudra 6 médailles, dont la Légion d'Honneur remise par le Général de Gaulle : elle les avait entrevues en 1929 dans un songe prémonitoire. La pire épreuve morale l'atteint en même temps, en 1943 : le Seigneur l'en avait également prévenue 20 ans plus tôt : « Tu seras accusée de mensonge par ceux qui auront cru en toi. Un de ceux-là, un religieux (...) te fera passer pour une fausse mystique, une créature de péché. Le temps de calamité pendant lequel cette épreuve t'arrivera aidera puissamment à sauver le monde. » (6 juillet 1923) Sa grandeur d'âme lui permet de pardonner à son accusateur, mais son sens de la vérité l'oblige à lui écrire : « Sans trop tarder, nous entrerons dans notre éternité, le pays de la lumière et de la charité. Merci pour tout. Vous verrez là-haut et comprendrez bien des choses ».
En 1946, Rome permet la fondation de la première Fédération de monastères de femmes, et Mère Yvonne Aimée en est élue Supérieure générale. Les dernières années de sa vie seront donc consacrées, malgré une santé de plus en plus précaire, à répondre à ses multiples charges avec une efficacité rare et une énergie qui lui permettait de donner le change. Très active, pleine d'entrain, son équilibre psychologique lui permettait de passer sans effort apparent des états les plus divers : d'extases, de souffrances, aux réalités multiples qu'elle devait assumer quotidiennement, et c'est en rayonnant la paix qu'elle accomplissait toutes ses tâches.
Car Mère Yvonne Aimée est avant tout une contemplative dans l’action. Sa relation à Dieu est de tous les instants, et c'est l'Amour qui est le fil conducteur de son existence. Elle vit à un suprême degré la vertu d'abandon, qu'elle aimait présenter comme « le fruit délicieux de I'Amour».
C'est dans cette attitude profonde que le Seigneur vient la chercher le 3 février 1951, à 49 ans, tandis qu'elle se disposait à partir visiter ses sœurs missionnaires du Natal la semaine suivante.
Aussi sa dernière parole exprime-t-elle sa foi en Dieu et sa disponibilité totale au service du prochain : « Si je peux, j'irai. C'est mon devoir ! ».
Elle réalise ainsi le programme que le Seigneur lui avait inspiré à l'âge de 9 ans : « Je veux n'être qu'à Toi, mais je veux surtout Ta Volonté ».
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Son rayonnement aujourd'hui
Le Père Gaston Courtois, procureur général des Fils de la Charité, qui l’a très bien connue, pouvait témoigner: « J'ai toujours eu grande confiance en sa loyauté, en sa simplicité et dans sa charité désintéressée. C'était certainement une âme privilégiée qui a essayé de répondre à tout ce que lui a demandé le Seigneur un « oui » fidèle. Elle avait un sens très aigu de l'Église, des vues très ouvertes sur les problèmes actuels, une largeur d'esprit du meilleur aloi. Seuls ceux qui l'ont approchée de près savent à quel point elle a souffert, dans un grand esprit de rédemption, plus spécialement pour les prêtres. » (23 novembre 1955)
Depuis la mort de Mère Yvonne-Aimée, sa réputation de sainteté n'a fait que grandir et se propager bien au delà de nos frontières. De nombreuses personnes viennent chaque année à Malestroit se recueillir sur sa tombe et confier leurs intentions de prière à son intercession. Celles qui l'invoquent sont unanimes à reconnaître l'efficacité de son intervention auprès de "son Roi d'Amour" dont elle a, sur terre, accompli la Volonté avec une fidélité inébranlable et accepté d'être la collaboratrice et la messagère de la Miséricordieuse Bonté. Des messages du monde entier arrivent chaque année à Malestroit témoignant de la confiance envers Mère Yvonne-Aimée ou de grâces reçues par son intercession.
L'étude de son dossier en vue d'une béatification est en cours d'examen à Rome.
Neuvaine de prière par l'intercession de Mère Yvonne-Aimée
Les personnes qui recevraient des grâces attribuées à Mère Yvonne-Aimée sont invitées à se faire connaître à la Communauté :