Des œuvres remarquables
Je n’ai en moi qu’un désir :
aimer Dieu et mon prochain
et m’oublier totalement pour
me livrer entièrement à ces deux amours.
Yvonne Beauvais
Un amour précoce pour les pauvres
L’amour des pauvres selon l'Evangile fut toujours prioritaire dans la vie d’Yvonne et jamais elle ne sépare l’amour du prochain de l’amour de Dieu. Ceux-ci s’impliquent intimement dans sa vie, l’amour de Dieu inspirant son amour du prochain et son amour du prochain allant directement jusqu’à Dieu.
Dès sa petite enfance, avant ses 4 ans, son cœur est ouvert aux pauvres qui sonnent à la porte de ses grands-parents. Elle va vers eux avec sympathie et compassion cherchant à leur donner ce qu’elle a de plus beau ou de meilleur.
A partir de 17 ans, Yvonne se rend quotidiennement dans les quartiers les plus dangereux de Paris : la « zone rouge » pour secourir des familles en détresse. Comme tous les vrais serviteurs des pauvres, elle n’allait pas à eux par pitié, mais elle discernait leur valeur et leur vertu, comme elle l’exprime : « J’étais très émue en quittant cette demeure de gens si méritants. » ; « Qu’il y a de belles âmes dans ces humbles demeures. »
Profonde est l’unité qu’elle fait entre les pauvres et Jésus, qui s’est fait pauvre parmi les pauvres, les exclus, les rejetés. En 1924, un jour où elle ne pouvait aller à la messe, elle reçoit de Jésus même la formule de l’identité entre son amour du Christ et son amour des pauvres : « Vous me trouverez dans le pauvre comme dans l’hostie. » Elle répond d’emblée : « Tu as consacré les pauvres comme tu as consacré l’hostie. N’ayant pas le bonheur de communier en ce moment, je vais te chercher chez eux. »
Le Seigneur l’appelle à la vie religieuse à Malestroit dans un Ordre hospitalier voué au service « des pauvres et des malades ». Elle y entre en 1927 et redonne un élan à cette communauté en faisant construire une clinique moderne pour accueillir et soigner malades et souffrants.
Un témoin note : « Mère Yvonne Aimée avait un abord peut-être un peu froid, distant, une prestance qui en imposait, due sans doute à sa grande timidité, mais il suffisait de l’approcher pour savoir ce qu’était son cœur. Maternelle pour tout le monde, le grand et le petit, le riche comme le pauvre. (…) Sa bonté allait surtout vers le petit, le souffrant. L’on sentait qu’avec ces êtres privés de tout, tant au physique qu’au moral, son grand cœur souffrait de la souffrance des autres. »
Fondation de la Clinique
Avant son entrée au noviciat, dès 1923, Yvonne Beauvais avait perçu et imposé la nécessité de rénover et d'agrandir la petite clinique d'alors. C'est grâce à ses lumières que le projet prend forme rapidement. L’évêque de Vannes, Mgr Gouraud, après s'être longtemps opposé à ce projet jugé trop ambitieux donne son accord en 1927. Sr Yvonne Aimée dessine alors elle-même les plans de la future clinique, présente le projet et suscite les dons auprès d'un généreux bienfaiteur. Elle est la cheville ouvrière de la construction du nouveau bâtiment. La clinique est ouverte à la mi-juin 1929. Le projet "utopique" est devenu réalité.
Un courage exemplaire
La mission de Mère Yvonne Aimée ne s'arrête pas à son couvent ou à l'Ordre des Augustines, elle s'étend à la France et au monde. Pendant la guerre, elle va étonner son entourage par son courage et son sang-froid.
Accueillir, soigner et protéger les soldats blessés
C'est précisément le 6 juin 1940 (4 ans jour pour jour avant le débarquement) qu'arrivent les premiers blessés à la Clinique de Malestroit : « 20 soldats de la drôle de guerre, « repliés » du Nord, « harassés, fourbus, n'en pouvant plus, mais avec un moral magnifique. Pour leur faire de la place, nous évacuons nos malades civils, tous ceux qui sont transportables » écrit Mère Marie Anne.
Trois jours plus tard, le 9 juin, ce sont 9 officiers « tous sur des brancards, partis de Lisieux le matin à 4 h. » Le lieutenant Roland Breton, lui-même « blessé vers Abbeville, opéré à Beauvais, puis transféré à Lisieux, où se forma par hasard le groupe d'une dizaine d'officiers transféré à Malestroit par train sanitaire puis camionnettes », rédige ses souvenirs 30 ans plus tard (en 1975) : [10 juin] « Réveil. Petit déjeuner : café au lait, pain, beurre, digne d'un 3 étoiles. [...] Pansement : Le toubib a commencé par moi. Douceur des mains, et, oh, surprise, des compresses qui ne collent pas. »
Mère Yvonne Aimée constate : « Beaucoup de travail à la clinique. Les blessés arrivent. Nous en avons une quarantaine. [...] Près de 2000 réfugiés [du Nord] à Malestroit. C'est un défilé quelquefois ininterrompu au parloir, et des demandes de secours, de travail,etc. Comme c'est triste ! »
Parmi ces soldats français arrivés à la clinique en 1940, presque tous écriront par la suite pour exprimer leur reconnaissance.
Le 13 août 1940, à l'arrivée des Allemands à Malestroit, tous ces blessés sont faits prisonniers. Mère Yvonne Aimée leur dit au moment de partir : "Si vous vous évadez, revenez ici !" C'est ce qui arrive. Grâce à des complicités, trois d'entre eux réussiront à s'évader, et se retrouvent par hasard dans le même car Vannes-Malestroit le 4 septembre. « 3 types-qui-ne-se-connaissent-pas » arrivent donc à la clinique et sont accueillis (dans la discrétion) par leurs infirmières hospitalières et le docteur Quéinnec, avec qui ils peuvent sabler le champagne, « du vrai champagne !! ». Mère Yvonne Aimée leur dit alors : « Nous allons vous cacher ici en attendant que je vous trouve des faux papiers. » Ils seront aidés à franchir la ligne de démarcation, pour qu'ils puissent encore servir la France.
Un refuge pour tous : civils...
En plus des militaires, la clinique héberge aussi des civils. La guerre s'installe avec les restrictions et les privations. Nous relevons dans le courrier :
Octobre 1940. « Il est angoissant d'avoir tant de personnes à ravitailler. Nous sommes 100 Religieuses, la Clinique qui se remplit à nouveau, le personnel, cela fait 250 personnes environ en ce moment. C'est très difficile pour nos malades, surtout pour le savon. Pour le charbon, nous avons reçu 21 tonnes mais il nous faut 200 tonnes généralement. »
Octobre 1941. «Toujours pas de charbon pour cet hiver, plus une goutte d'essence pour l'ambulance et pas de téléphone. La viande se fait rare maintenant. À la Clinique nous avons pu en servir 4 fois la semaine dernière, 3 fois à la Communauté, mais cette semaine, elle est inexistante, pour nous tout au moins.»
...résistants, parachutistes alliés,
À partir de 1943, ce sont des parachutistes et résistants qui sont accueillis à la clinique dont le Général Louis Alexandre Audibert, chef de la Résistance de l'Ouest, sous le nom de Monsieur Chevalier, transformé à la mi-mars en Monsieur Le Bihan. Arrêté le 18 mars 1944, il est déporté à Buchenwald, d'où il revient en avril 1945. C'est lui qui décorera la clinique de la Croix de Guerre le 5 août 1949.
Dans la période du 16 avril au 7 juin 1944 : Quatre F.F.I. (Forces Françaises de l'Intérieur = Résistants), quatre parachutistes (2e régiment, 4e bataillon, 3e compagnie) sont accueillis.
A la suite du Débarquement, les premiers chasseurs parachutistes arrivent au Camp de la Nouëtte (Saint Marcel) dans la soirée du 7 Juin 1944. Leurs blessés nous furent amenés dès le 13 Juin 1944. Pendant le combat de Saint Marcel, nous avons soigné également tous les blessés Allemands de la bataille.
Le 23 Juin 1944, la Gestapo fait une perquisition à la Clinique vers midi. « Nous hébergions dix [blessés] en situation irrégulière, sans papiers d'identité et sous de faux noms. C'est vous dire l'angoisse que nous éprouvions », note le Dr Jean Quéinnec.
... jusqu'à l'évasion
Rappelons aussi les deux jeunes parachutistes du 2e régiment, 4e bataillon, 1ère compagnie qui prirent l'habit religieux à Malestroit : Roger Berthelot (21 ans) avec des plaies par balles à la jambe gauche (sorti le 24 juin après la perquisition) et Philippe Reinhart (19 ans) avec une fracture de l'avant-bras (sorti également le 24 juin). Introduits à l'intérieur du monastère et habillés en religieuses augustines, « Sœur Roger » et « Sœur Philippe » sont placés à la tribune de la chapelle, et enfin dans la chambre du prédicateur, séparée des Allemands par un simple mur de parpaings puis conduits dans les bois, où le docteur Quéinnec allait les visiter et les soigner.
La fin de la guerre
Le 12 juin 1944, c'est le bombardement de Ploërmel : la clinique reçoit 22 blessés, dont plusieurs très atteints. Le lendemain, en arriveront « plusieurs autres moins touchés ». Et le 15 juin, « nous avons reçu des Français mitraillés dans leur auto, le colonel Duval, parent à Sr M. de la Nativité et le colonel Philouze et le petit Alain Philouze mort presque en arrivant des suites de ses blessures » (Mère Marie Anne).
Avec les blessés du front de la Vilaine qui ne céda qu'en mai 1945, ce sont près de 200 blessés (ou accidentés), parachutistes, résistants, fusiliers marins ou soldats du 4e bataillon Rangers, qui ont été soignés à la clinique.
Mère Yvonne Aimée résume un peu plus tard :
« Notre danger permanent a été la proximité du Camp de Saint Marcel qui groupait quelques milliers de maquisards et ces derniers temps de nombreux parachutistes français. Notre rôle d'hospitalière avait de quoi s'exercer. [...] Nous ne pouvions soigner nos blessés français et alliés sans attirer sur nous les foudres allemandes. La Gestapo nous surveillait et nous eûmes à subir des perquisitions et bien des émotions. Nous avons dû pratiquer en grand la prestidigitation! [...] L'État-major Allemand, qui résidait à Malestroit, était particulièrement excité par la défaite subie au Camp de Saint Marcel, à 2 kilomètres de Malestroit. Notre ville était à leurs yeux le centre de la Résistance, où se tenaient cachés les chefs Français. »
Mère Yvonne Aimée prend de gros risques en accueillant clandestinement à la clinique, outre le général Audibert, chef de la Résistance de l'Ouest, des parachutistes de diverses nationalités et des résistants blessés qu'elle parvient à soustraire à la Gestapo. Un des bénéficiaires de son « hospitalité » dira : « Ce qui nous frappait le plus, c'était sa sereine assurance, foncièrement humaine. Elle savait organiser et tout diriger avec le sourire et une douce obstination ». La reconnaissance nationale et internationale vaudra 6 médailles à Mère Yvonne-Aimée, dont la Légion d'Honneur remise par le Général de Gaulle : elle les avait entrevues en 1929 dans un songe prémonitoire.
Un tempérament fédérateur
C'est autour des Années 1920 que le mouvement qui allait amener les monastères de l'Ordre à se grouper en Fédération s'amorça. Réunies à Dieppe en 1924 les supérieures prirent conscience d'un besoin de relations plus étroites entre monastères. C'est à Mère Yvonne-Aimée que devait revenir à partir de 1931 la charge et le mérite de conduire ce projet. Partant du principe d'une Fédération, des statuts étaient rédigés et soumis à Rome dès 1937. Le 12 Septembre 1946, Rome approuvait la Fédération ; Mère Yvonne Aimée en était élue première Supérieure générale.
Quelques années plus tard, dans la Constitution Sponsa Christi, Pie XII invitera les religieuses à suivre cet exemple, invitation régulièrement reprise depuis par les différents Papes.
Les 12 communautés des Augustines de la Miséricorde sont situées en Europe et Afrique et constituent la Fédération Europe/Afrique. Une autre Fédération d'Augustines de la Miséricorde a été organisé pour le Canada. Les 2 fédérations gardent des liens fraternels très étroits.
Notre Fédération se donne pour but :
- de stimuler une authentique vie évangélique selon la spiritualité de l’Ordre,
- d'accroître l’union entre les monastères dans le respect de l’autonomie de chacun,
- de promouvoir l’esprit augustinien de partage et d’entraide,
- de favoriser la formation des sœurs,
- de soutenir l’esprit missionnaire.
Lien pour le Site de la Fédération
Un don artistique
Mère Yvonne-Aimée, une "contemplative dans l’action", très active, pleine d'entrain, a impulsé des œuvres remarquables tout au long de sa vie, de la fondation de la Clinique des Augustines, à son courage exemplaire pendant la guerre, son témoignage d'Amour pour le Christ, la création de la première fédération des Augustines mais s'est également révélée une artiste à part entière et très douée, laissant à la Communauté un héritage considérable d’œuvres d'art.
C'est durant ses études en Angleterre, que la jeune Yvonne, alors adolescente, s'était formée aux Arts (dessin, musique, danse...).
Jésus Roi d'Amour
Ô Jésus Roi d'Amour,
j'ai confiance
en votre miséricordieuse Bonté.
Cette prière a été donnée par Jésus à la jeune Yvonne Beauvais le 28 Août 1922. Elle est devenue la source de nombreuses grâces spirituelles et temporelles pour les personnes qui l'ont adoptée. Plus tard, Sr Yvonne-Aimée illustra cette invocation par ce dessin qui est largement diffusé au delà de nos frontières.
Reproduction de tableaux
A la demande de sa supérieure, Sœur Yvonne-Aimée a réalisé plusieurs reproductions de tableaux de grands maîtres (Velazquez, Müller...) pour la Communauté.
La création de séries de fleurs
Voici quelques unes de ses productions artistiques :
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